Histoire
Quelles événements et quels coups du sort ont fini par m’amenée en cette froide nuit de pleine lune à attendre que ma proie daigne montrer le bout de son nez?
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Je suis née le 10ème jour de Dan en l’année 387 de l’Ère du Grand Cauchemar. J’ai le souvenir vague d’une mère humaine douce et tendre et d’un père aasimar droit et attentionné. La vie était belle il me semble et notre famille heureuse comme n’importe quelle autre. Jusqu’à ce que, lors de ma cinquième année de vie, mon paternel change d’attitude du jour au lendemain. Devenu colérique et cruel en très peu de temps, mes yeux d’enfant à l’époque le regardaient constamment avec peur, tristesse et incompréhension. Pourquoi papa est-il toujours méchant avec maman? Suis-je une mauvaise petite fille? Papa n’aime plus maman? Ce genre de questions enfantines tournait dans ma tête telle une spirale infernale sans fin. C’est bien plus tard que je découvris la vérité sur mon créateur, son Maître Bregor et l’Insurrection.
La vie de ma mère fut perdue un matin du mois de Vur. Mon père devenu incontrôlable l’égorgea sans demander son reste et m’abandonna à mon sort à la porte du village de Quiétude là où nous habitions à l’époque. A partir de ce moment je perdis mon innocence et mon insouciance. Je n’avais même pas 5 ans que je devais me débrouiller seule dans le rude hiver de Norpalie. Aussi jeune que je fus à l’époque, ma haine et tous les sentiments mauvais qui l’accompagnent commencèrent à me tourmenter et je me promis qu’un jour je comprendrais pourquoi papa avait fait ça à maman et pourquoi il m’avait abandonnée. Après m’être mise à l’abri de tous les regards indiscrets, je versai toutes les larmes de mon petit corps de fillette. C’est le cœur triste et effrayé que je me décidai à quitter le village de Quiétude et à m’aventurer dans les paysages hostiles et glacials du pays de Norpalie. N’étant qu’une enfant je n’étais bien sûr aucunement prête à cette épreuve. Malgré ma colère et mon énergie débordante, les frimas de l’hiver eurent tôt fait de venir à bout de mes petits membres fatigués. Je m’écroulai dans la neige sous un sapin aux aiguilles de teinte vert foncé hors d’haleine et au bord de l'épuisement.
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J’entends des éclats de rires sonores et des bruits de verres qui s’entrechoquent à travers une fenêtre ouverte et je soupire tout en restant immobile et attentive. A croire que le condamné à mort sent son heure arriver et qu’il repousse le moment fatidique le plus qu’il peut. D’après Eymeric et les informations de la Guilde, Grimald aurait la fâcheuse habitude de se rendre tous les soirs au « Loup argenté ». Je suis tirée de mes réflexions par la sortie de deux énergumènes bruyants et dégoûtants qui se glissent tout comme moi dans un coin ombragé pour, d’après leurs gémissements étouffés, soulager mutuellement leur corps de ce qui fait leur virilité. J’étais au bord de la nausée mais je me repris dès que ma cible me revint à l’esprit. Ce n’étaient pas ces deux hommes que je devais tuer. Mon esprit ignora donc ce couple des plus répugnants et se focalisa à nouveau sur l’auberge. L’oiseau finirait bien par sortir. La patience est l‘une de mes principales vertus.
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Je fus tirée de mon sommeil comateux par un bruit fort et assez proche. J’ouvris doucement mes paupières à moitié collées par le froid et découvris devant moi un molosse géant de couleur ébène qui grognait et aboyait tout en tournant sa tête de temps à autre comme pour appeler quelque chose ou quelqu’un. Mes yeux étaient fascinés par sa beauté et sa grandeur. Mon regard chaud et doré se planta dans celui de la bête ce qui eut pour effet de le faire taire. Je m’approchai aussi doucement que mes membres ankylosés me le permettaient. Je tendis une main tendre et calme et je la posai délicatement sur la tête du monstre qui s’assit automatiquement sur son derrière, allongeant la tête pour savourer un peu plus mes caresses. Ce contact des plus délicieux me fit oublier momentanément pourquoi je me trouvais à cet endroit précis mortifiée de froid. Le chien, car s’en était visiblement un, certes très grand, mais cela restait tout de même un beau spécimen de canidé, vint se coller tout contre moi pour me réchauffer, son odeur animale m’apaisait et sa queue battait l’air à côté de moi pour à chaque fois achever sa course dans mon flan. Nous restâmes ainsi tous les deux pendant quelques minutes.
Soudain j’entendis non loin le son de pas dans la neige et une voix féminine appeler d’un ton clair et chantant :
« Smoke?! Où es-tu mon chien? Viens voir Lucille mon grand! »Le dénommé Smoke jaillit comme une flèche de l’endroit où je me trouvais et alla rejoindre sa maîtresse au pas de course. Il ne tarda pas à revenir me voir cette foi- ci accompagné de cette Norpalienne prénommée Lucille. Cette dernière avait un visage fort clair entouré de longues mèches de cheveux sombres et drues qui lui tombaient sur les épaules. Ses yeux bruns comme la terre m’observaient avec douceur et étonnement. Elle m’adressa la parole avec chaleur et bienveillance :
« Comment t’appelles-tu jolie demoiselle et quel âge as-tu? Pourquoi es-tu seule ici au milieu de nulle part en plein hiver ? Où sont tes parents ? »A ces questions mon cœur se rembrunit mais je ne lâchais pas le regard de l’inconnue. Je scrutais le moindre détail de ses traits réguliers et attrayants. Elle devait être aussi vieille que maman et elle réussit à me mettre à l’aise. Après maintes hésitations, je finis par lui répondre d’une voix incertaine mais des plus sérieuses:
« Je m’appelle Syrielle Oniria fille de Mahel Oniria et Lina Silmë. J’ai 4 ans et bientôt 5. Mon papa aasimar a tué ma maman humaine et m’a abandonnée aux portes de Quiétude mon village de naissance. Connais-tu Quiétude Madame ? »Les yeux de mon interlocutrice se voilèrent d’anxiété et d’effroi. Lucille connaissait très bien Quiétude et y allait souvent pour ramener des commandes faites par certains habitants demi-êtres. Elle n’avait jamais entendu parler de la famille de Syrielle. Si la fillette disait juste, elle était orpheline de mère et abandonnée par son père. Elle ne pouvait pas laisser cette jolie et adorable enfant livrée à elle-même dans cette immensité neigeuse.
« Que dirais-tu de venir à la maison avec Smoke et moi ? Je m’appelle Lucille Ferram, je suis rôdeuse au service de la Norpalie et je vis à quelques kilomètres d’ici à Bourg-en-glace un joli petit village. Mon mari Marvin est Maître-chien et un peu bourru. Les demi-êtres qui vivent à Quiétude l’effraient un peu mais il n’aura pas le choix de t’accueillir. Tu verras tu te sentiras bien. » Elle la garderait à la maison le temps qu’elle éclaircisse cette histoire.
Je ne comprenais pas tout ce que ma bienfaitrice me disait mais peu importait, je mourrais de faim et de froid. Je n’étais après tout qu’une jeune aasimar de 4 ans et j’aspirais à un peu de chaleur et de confort, rien de plus.
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A force de ne pas bouger d’un centimètre durant de longues périodes comme cette nuit, mes muscles s’ankylosent et me font souffrir malgré ma bonne forme physique. J’attends depuis près de deux heures désormais et mon attention s’étiole légèrement en entendant une chanson à boire fort connue. Des souvenirs refont surface dans mes pensées…
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« Et tavernier ! On a soif ici ! Une tournée de pintes pour mes compagnons s’il te plait ! »Je m’en souviens comme si c’était hier. A l’époque Marvin et Lucille m’emmenaient souvent avec eux dans leurs diverses activités professionnelles et de loisirs. Le couple de Norpaliens avait fini par m’adopter tout en me laissant le nom de mon père naturel pour ne pas trop perturber mes habitudes. Lucille avait fini par apprendre ce qui s’était passé avec mes parents biologiques. Elle n’en parla à personne sauf à Marvin son époux. Après de nombreuses discussions et maints pourparlers, la jeune femme réussit à convaincre le jeune éleveur de m’accueillir dans leur foyer. Pour une raison obscure ils ne pouvaient avoir d’enfant et c’était pour eux l’occasion rêvée. Marvin malgré son rejet naturel des demi-êtres fit abstraction de mes origines et m’accepta bon gré mal gré. Nonobstant mon foyer et ma nouvelle vie, ma rancœur et ma haine de ce qui touchait de près ou de loin à Quiétude et à mon père, m’obscurcissaient le cœur irrémédiablement. J’enfouissais comme je pouvais ces sentiments au plus profond de mon être.
Le maitre-chien n’a jamais été un père aimant et tendre (du moins en surface) mais c’était quelqu’un de juste et droit dans ses bottes. C’était un très bon instructeur et il m’enseigna l’art de s’occuper d’une meute de molosses pleine d’énergie. Je paraissais chétive à première vue mais mon don de sérénité m’aidait beaucoup et à l’époque je l’utilisais de temps à autres sur les créatures les plus violentes. Je préférais de loin me faire obéir par la douceur que par la brutalité et les cris, du moins avec les animaux. Jamais aucun des chiens de Marvin ne m’avait fait du mal.
Je fus donc élevée parmi les bêtes qu’elles soient domestiques ou sauvages. En effet, j’adorais accompagner Lucille dans ses activités de rôdeuse. Très souvent escortées de Smoke nous battions les bois et les forêts, nous suivions les traces d’animaux et nous chassions de temps à autres. Les courses folles avec Smoke la langue pendante étaient mon passe-temps favori. La nature me fascinait et je m’y sentais comme chez moi. Les biches, les renards et les blaireaux m’observaient souvent de loin sans m’approcher. Parfois leur curiosité et mon envie de les toucher prenaient le dessus et il n’était pas rare que je caresse le flan ou le museau d’un raton ou d’un faon téméraire. La faune locale apaisait mon esprit tourmenté. Mais l’animal qui me fascinait le plus et qui était malheureusement rare dans nos forêts de Norpalie car persécuté pour sa fourrure par les braconniers était le Lynx des neiges. Cette créature presque mythique m’obsédait et je rêvais d’un jour en observer un.
Ce fut lors de ma quinzième année, juste avant d’entrer au service du roi de la Norpalie en tant que rôdeuse comme ma mère, que je le rencontrai enfin. J’étais partie seule à la recherche d’un animal blessé que l’on aurait vu à plusieurs reprises dans les environs. Le braconnage était chose courante et les rôdeurs avaient beaucoup à faire de ce côté-là. Je haïssais les piégeurs. J’avais régulièrement des pulsions violentes envers ces personnages qui disséminaient certaines races pour une malheureuse poignée de Gel’or. C’est la colère au cœur que je me lançai à la recherche de cette créature. Je me déplaçais rapidement et le plus silencieusement possible. Je pouvais être très discrète quand je le désirais vraiment. Je marchais depuis maintenant une bonne heure lorsque j’entendis de petits bruits étouffés non loin de ma cachette. J’écoutais attentivement et m’approchai en silence quand je tombai nez à nez avec la chose la plus adorable de tout Ildirith, la patte prise dans un piège. Il feulait faiblement et essayait vainement de se défaire du guêpier dans lequel il s’était fourré. Petite boule de poils de teinte crème aux grands yeux gris-bleu. Je ne voyais aucune trace de sa mère et je me permis de douter qu’elle fut encore en vie. La mini créature devait être orpheline et mon cœur fondit lorsque mon regard se plongea dans le sien. Il avait conquis mon cœur d’un seul coup d’oeil. Ni une ni deux je le libérai et il se blottit dans mes bras tout tremblant et le cœur battant la chamade. Je fermai les yeux de bonheur à son contact. L’observant avec plus d’attention et en prenant toutes les précautions du monde pour ne pas plus abîmer sa patte blessée j’en conclus que mon petit protégé était un mâle.
En rentrant à la maison j’ai pensé que Marv’ allait me tuer. Il hurlait dans la cuisine en gesticulant :
« Parbleu qu’est-ce que c’est que ça !?? T’as oublié qu’on élève des chiens ici ??! Il va se faire dévorer en deux temps trois mouvements ton plumeau. Et puis je ne veux pas m’occuper de cette créature ! Hors de ma vue ! Je ne veux pas de ça chez moi. Du vent ! »Il fit un geste avec son bras qui signifiait que je devais partir avec ma trouvaille et lui trouver un autre endroit. Mais j’étais du genre têtue et plantant mon regard le plus doux et le plus innocent dans celui de mon père adoptif je pus obtenir de lui que je demande l’avis de Lucille quand elle rentrerait du travail. J’avais presque gagné la bataille car Lucille était beaucoup plus conciliante et sensible que le Maître-chien. C’est avec un sourire aux lèvres que je soignai mon petit protégé, folle d’impatience que la rôdeuse revienne. Cette dernière n’accepta le bébé lynx qu’à moitié mais peu importait. Je pouvais le garder à la condition de l’élever dans le seul but de le relâcher dans la forêt quand le temps serait venu et Lucille ne voulait pas que je lui donne de nom. Elle considérait le lynx comme un animal sauvage et en l’occurrence elle ne voyait pas l’utilité de lui donner un patronyme.
Je l’élevai donc du mieux que je pu en l’appelant le fauve ! En sa compagnie j’oubliais ma haine et ma rancœur et je profitais de chaque instant de sa présence car je savais que ça ne durerait pas. Quand Lucille décidait de quelque chose c’était ainsi et pas autrement. Je n’avais jamais défié son autorité, je lui devais tout à cette femme.
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Quand j’y repense aujourd’hui ce fut la plus belle année de ma vie. Désormais le fauve n’est plus, mais il m’accompagne toujours en pensée lors de mes virées forestières ou nocturnes. C’est ce moment-là que choisit la cible pour sortir de son trou. Il se trouve devant la taverne à observer le ciel rempli d’étoiles scintillantes et d’une lune blafarde. A quoi pense-t-il ? Je ne saurais le dire et je m’en moque. Je vais enfin pouvoir réaliser ce pourquoi je suis venue. Il se met en route après quelques instants de profonde communion avec le ciel. L’individu est plutôt petit et maigre pour un homme de ce pays. Je le suis comme son ombre avec la plus grande précaution. Personne ne nous suit. A chaque chasse humaine je mets en œuvre tous ce que j’ai appris avec Eymeric et La Guilde. Je ne travaille pas a proprement parler pour eux. Je les aide de temps à autres lorsque je suis en repos pour mon compte personnel. Disons que je suis à l’instar d’un électron libre parmi l’organisation.
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Juste après avoir relâché le fauve, je me dirigeais péniblement vers la maison lorsque j’entendis le pas lourd et caractéristique d’un intrus de la forêt. Cet individu se révéla être un braconnier venant vérifier ses pièges. Ma tristesse et ma rancoeur de devoir me séparer du Lynx n’arrangèrent pas les choses et mon humeur se détériora de façon exponentielle. Cela faisait depuis trop longtemps que je supportais les agissements de ces ordures sans rien pouvoir faire. L’occasion était trop belle pour la laisser s’échapper. Je me glissai donc à pas de loup vers ma proie et pris avec précaution mon couteau de chasse dont je ne me séparais jamais lorsque je sortais. Mon geste fut rapide et bref. La lame glissa comme dans du beurre et le braconnier s’affala à mes pieds comme un gros tas puant et encore chaud. Je le laissai là pourrir dans son sang sans un regard. Pendant l’acte je ne ressentis aucune émotion. Seulement après, je fus soulagée et pleine d’énergie. J’avais aimé cela…
Cet événement secret marqua ma vie à jamais et ce fut peu après ce dernier que j’entrai au service du roi Jerodian en tant que rôdeuse tout comme ma mère adoptive. J’en fus très fière et m’acquittai de mes tâches avec brio. Mes parents adoptifs étaient satisfaits de moi et heureux. Malgré tout cela, mon crime occupait toutes mes pensées d’autant plus que l’on avait retrouvé le piégeur et qu’on recherchait son assassin. Malgré le danger, je voulais recommencer. Je désirais ardemment continuer à faire justice moi-même. Ma colère me consumait un peu plus chaque jour. Néanmoins je m’assagis un peu et m’entrainais comme je pouvais pour développer ma vitesse et ma discrétion et ainsi recommencer à tuer sans dangers trop grands. J’ôtais la vie autant que je pouvais. La population la plus cruelle et la plus dépravée de la région y passait.
Un jour alors que j’étais en train de courser une femme qui avait tué son enfant, mon adresse et ma ruse furent déjouées par un individu bien plus habile et discret que moi. Il réussit à m’amener le plus silencieusement possible dans un de ses repères. Je ne pouvais en aucun cas bouger et j’eu une réelle peur de mourir ce jour-là. Lorsqu’il me relâcha dans cette pièce mal éclairée et qu’il fit tomber son capuchon, je pus enfin apercevoir son visage. J’aurais été incapable de lui donner un âge. Il avait un visage halé et des cheveux noirs comme du charbon. Ces yeux durs et sévères étaient de la même teinte que ses cheveux. Une cicatrice diaphane lui courait sur la joue droite. C’était sa seule particularité d’ailleurs. Il passait vraiment inaperçu. Il me regarda un instant de son regard noir. Je ne cillai pas d’un sourcil en me demandant ce qu’il pouvait bien me vouloir. Je finis par rompre le silence.
« Qui es-tu et que me veux-tu ? »Je l’invitai à me répondre :
« Tu peux m’appeler Eymeric… Syrielle Oniria »« Comment me connais-tu ? Et que veux-tu bon sang. Vas-tu me le dire? »« Tu me semble bien impatiente et bien trop émotive ma chère Syrielle. Assied-toi un moment si tu veux bien »Il m’indiqua un tabouret en bois grossier et je m’y assis sans broncher. Il avait une telle emprise que je n’avais que le désir de lui obéir.
« J’observe tes agissements depuis un moment déjà et je peux te dire que tu es douée mais il y a tout de même de nombreuses choses à améliorer notamment dans ta précision et ta force, sans parler de ta discrétion. L’art de tuer ne s’acquiert pas en quelques mois. Je travaille pour la Guilde en tant que régicide. Je pense que tu as déjà entendu parler de cette organisation ? »J’acquiesçai brièvement et il reprit :
« Je peux t’apprendre certaines choses pour t’améliorer et en échange je voudrais que tu me rendes des services de temps à autres. Tu es prometteuse et j’aimerais pouvoir compter sur quelqu’un comme toi à l’avenir. Veux-tu réfléchir à mon offre ou bien acceptes-tu sur le champ ? »Je réfléchis durant quelques minutes. J’étais sur mon tabouret perdue dans mes pensées. Ma seule réponse fut :
« Comment connais-tu mon nom ? »Mon interlocuteur hésita un bref instant et finit par me le révéler :
« La Guilde à des yeux et des oreilles partout mademoiselle. Disons que nous connaissons ton père et la faction dans laquelle il travaille »Au nom de mon père, comme à son habitude mon cœur se durcit et mon regard se remplit de mépris. Je le détestais depuis très longtemps. Mon incompréhension et ma tristesse avaient transformé mon cœur en une boule de nerfs et de vengeance. Il avait tué ma mère et m’avait abandonnée. Jamais je ne lui pardonnerais ce qu’il avait fait ce jour-là. Je me laissai envahir par ma colère et ma rage en écoutant toute la vérité sur mon géniteur. Je n’avais pas tergiversé pendant des heures. Ma décision était prise et j’en fis part à mon nouveau mentor. Un jour cet homme souffrirait et regretterait. Je travaillerais à tuer chaque membre de cette Insurrection comme on l’appelait. J’aurais la tête de ce Bregor et la sienne…
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Cela faisait dix années que le régicide de la Guilde m’avait contactée. J’étais encore pauvre en sagesse et pleine de ressentiment à l’époque. Ma jeunesse jouait en ma défaveur et je me trouvais ridicule. Depuis j’ai acquis une certaine réputation au sein de la Guilde malgré le fait que je ne suis pas officiellement une de leurs membres. Tout le monde m’appelle la meurtrière aux yeux d’Or. Mon sang froid lorsque je passe à l’acte est connu de nombreuses personnes. A contrario de cela, je suis presque humaine lorsque j’ôte la vie. Durant ma jeunesse, je tuais dans le dos d’une manière vile et lâche comme n’importe quel assassin. Ma spécialité actuelle était de plonger mon regard brillant dans celui de ma victime et de lui caresser le visage pour apaiser son cœur avant de planter ma lame d’un geste précis et rapide dans son abdomen. Même en tuant ma douceur et ma grâce étaient mises à l’honneur. Je garde toujours le même mode opératoire. Pendant ces dix dernières années, certes j’avais amélioré mes capacités physiques mais j’avais également appris à apaiser ma colère et ma violence. Grimald eu une mort douce et la dernière chose qu’il vit fut un éclat d’Or. Paix à sa pauvre âme…