«Tout à fait regrettable...» songea Cran en serra les poings.

Leur menace ne l'impressionnait pas le moins du monde mais il trouvait toutefois regrettable de devoir en venir si tôt aux mains et à la force. Son acolyte lui murmura quelques informations fort pertinentes au sujet des deux idiots devant eux. Comment avait-il compris tout ça? Bah, peut importait au fond, l'Orc fit un grand pas en avant, s'interposant ainsi entre l'alchimiste et les bandits. Ils ne semblèrent pas apprécier et l'arme de l'individu de gauche tremblait déjà.

« Mais quel courage messieurs. Vous tenez vraiment à ce que je m'en mêle ? Je n'hésiterai pas un instant à vous broyez sales vermisseaux, je connais les gardes de la frontière et vous ne semblez pas être des leurs, notre or reste dans nos poches et vos armes au fourreau si vous tenez à la vie. Cran Brakior, c'est moi et s'pourrait que je sois le genre d'Orc qu'on emmerde pas. »

Le mercenaire respirait si fort qu'on aurait dit des grognements alors qu'il resserrait encore plus ses larges poings. Les hommes hésitèrent un moment mais tentèrent tout de même le coup. Cran désarma aisément son premier assaillant en repoussant facilement son arme et en lui brisant le poignait au passage. Sa force était seule responsable mais il ne s'en offusqua pas outre mesure, se contentant d'écraser le pied gauche du second et de l'envoyer au tapis d'un simple coup de poing.

« Ça va Monsieur Zacanal? Désolé du contre-temps, la route est dégagée à présent. Mais au fait, c'était quoi ces trucs au sujet du genou et du poignet? Vous avez l’œil ou c'est tout autre chose, j'aimerais bien être mis au courant histoire de bien vous protéger et de connaître vos forces. »

Soutenant le regard perplexe de son employeur, Cran attendit une réponse qui ne tarda point. Ce genre de magie ne lui faisait pas peur, au contraire, il la trouvait somme toute fascinante. Convaincu qu'elle constituait un réel atout, l'Orc s'empara des foulards des brigands avant d'en tendre un à Beogus.

« Ça nous sera utile, regardez, le vent se lève. Espérons ne pas tomber sur une vilaine tempête! Mais ne vous inquiétez pas Monsieur, je sais quoi faire pour palier à cette situation. Bon, on bouge, patron?»

Cran savait se battre même s'il n'était pas le meilleur, mais il n'aimait pas vraiment le faire. Sa force démesurée infligeait souvent de graves blessures bien malgré lui et il répugnait chaque mort inutile, même celle des bandits et autres fripouilles.

Grignotant une part de pain frais du jour, il prit les devants bloquant ainsi les bourrasques qui venaient de front. Le soleil était encore bas et ils devaient en profiter. Après sa petite collation, il se débattit quelque peu en tentant de mettre son propre foulard, mais réussi finalement. Il n'était pas à son avantage avec ce tissus orangé sur la tête, mais au moins le sable ne s'infiltrait plus dans son gros nez.

« Avec de la chance nous ne croiserons plus personne, non mais quelle horreur que cette fichue couleur ! Et vous me ferez plaisir monsieur Zacanal, n'allez pas raconter que j'ai porté ce truc hein ! »

Beogus qui n'avait encore rien dit à ce propos ne pu s'empêcher de rire en voyant les quelques cheveux blonds de Cran se balancer dans le vent par-dessus le foulard trop serré et mal installé. Pourtant la situation bascula rapidement alors que le duo était une fois de plus obligé de s'arrêter. Cette fois, des chiens du désert s'approchaient à grande vitesse.

Brandissant sa hache fabriquée pour une main orque, il pesta derrière le tissus protecteur avant de foncer en direction des cabots en hurlant. Ces derniers eurent tôt fait de rebrousser chemin en voyant le mastodonte approcher toutes dents dehors. Visiblement ils ne faisaient pas le poids. Cran rigola brièvement avant de ranger son arme. Pourtant rien n'était joué.

À peine avait-il entendu le cri de Beogus qu'une ombre immense vint couvrir le soleil ; Une aigle fureur avait prit l'alchimiste pour cible et tournoyait au-dessus de lui. L'attaque était imminente. L'Orc couru vers son protéger et le plaqua au sol juste à temps évitant ainsi la première tentative de l'oiseau de proie gigantesque qui poussa un cri strident et plutôt mécontent...

Aigle fureur:

Malgré le fait que Cran soit peiné de devoir en venir aux mains, il s'avança.
Puis, suite à une mise en garde dont les bandits n'avaient que faire, il se débarrassa du premier assaillant en repoussant son arme, la violence fut telle qu'il lui brisa les poignets déjà bien entamé.  Un léger frisson parcouru le corps de Beogus lorsqu'il vit la scène, mais cela ne sembla pas perturber le colosse, qui s'était déjà dirigé vers le second bandit auquel il écrasa le pied et mis fin au combat par ce qui semblait être un violent coup de poing, bien que cela ne soit qu'un coup des plus basiques pour un orc de cette taille.

Une fois les deux individus mis hors d’état de nuire, Cran s'approcha de Beogus qui était resté en arrière afin de ne pas s'exposer au danger inutilement.

« Ça va Monsieur Zacanal? Désolé du contre-temps, la route est dégagée à présent. Mais au fait, c'était quoi ces trucs au sujet du genou et du poignet? Vous avez l’œil ou c'est tout autre chose, j'aimerais bien être mis au courant histoire de bien vous protéger et de connaître vos forces. »


Beogus, qui avait jusque là évité de parler de ses capacités magiques, de peur que son interlocuteur ne réagisse mal à la nouvelle, n'avait plus vraiment le choix. Il entreprit alors de lui expliquer.

- Et bien pour tout vous dire, il ce trouve qu'en plus d'être alchimiste, je pratique la magie divine, elle me vient de ma mère. Mais si ça peut vous r'assurer, il s'agit de magie bienveillante, elle ne sert pas à faire le mal mais à apaiser certaines souffrances. C'est en parti à l'aide de celle-ci que j'ai pu identifier le mal qui rongeait ces deux crapules.

Il observa l'orc, s'attendant à une quelconque remontrance, mais bien au contraire, Cran sembla prendre la nouvelle avec un certain attrait.

Après lui avoir tendu le foulard de l'un des bandits,  ils s’enfoncèrent tout deux dans le vaste désert.

Alors qu'ils faisaient face à de grosses rafales de vents, ils continuèrent d'avancer, Cran passant le premier, protégeant ainsi Beogus des bourrasques de sables. L'alchimiste serra les dents en voyant le vent soulever le sable et s'abattre sur l'orc dans un claquement de fouet. Mais l'orc semblait d'avantage tracassé par son foulard que par ce petit désagrément qui était le sable, ce qui amusa légèrement Beogus.

Les ricanement cessèrent lorsque des chiens du désert furent à porté de vue.  Tandis qu'ils n'étaient plus qu'à quelques dizaines de mètres, Cran éleva sa hache tout en chargeant sur les chiens dans un hurlement qui aurait fait fuir des légions entières.

Beogus, qui se tenait en retrait, fût diverti par un autre cri qui venait du ciel, c'est lorsqu'il leva la tête qu'il eu la surprise de voir tournoyer un gigantesque rapace. Il eu à peine le temps de crier que l'oiseau le prit pour cible, plongeant avec rapidité et fureur, Beogus n'eu rien le temps de faire, stupéfait par sa taille, il resta comme paralysé. Alors que les griffes acérées du rapaces n'étaient plus qu’à quelques centimètres et qu'il vit sa fin venir, une force le coucha au sol. Les griffes se refermèrent, brassant le vent avec fougue. L'aigle reprit de l'altitude en poussant un cri à rompre la glace.  Beogus tout en reprenant ses esprits remercia l'orc qui était arrivé juste à temps pour le plaquer au sol.

Ils se relevèrent tout deux puis, tandis que l'aigle forma de nouveaux cercles dans le ciel, Beogus réfléchi à la situation. Ils n'y avait aucuns abris aux alentours et l'aigle n'aurait pas de grandes difficultés à les rattraper dans ce désert, il leurs fallait pourtant ce débarrasser de lui, c'est alors que Beogus eu une idée, Il songea à la corde qu'il avait acheté à simpliste avant de partir. il se tourna alors vers son compagnon et lui parla de son plan tout en sortant la corde de son sac.

-  J'ai peut être une idée pour nous débarrasser de lui, mais il va falloir faire vite, il ne devrait pas tarder à plonger de nouveau. Si tu attachais cette corde à ta hache, tu pourrais la lancer en direction de l'aigle lorsqu'il plongerait, j'ai lu dans un grimoire que les rapaces avaient beaucoup de mal à dévier leurs trajectoires lorsqu'ils plongeaient pour attraper une proie. Serte ce rapace est bien plus gros que ce que j'ai pu voir jusqu'à maintenant, mais sa manière de faire n'a pas l'air de différencier des autres. Bien entendu, si tu as une autre idée, je t'écoute.

Le patron connaissait apparemment un tas de trucs fort utiles! Cependant, jetant un rapide coup d’œil à ses gros doigts, Cran comprit qu’il n’avait pas la finesse nécessaire afin de nouer ladite corde à son arme avec le court laps de temps dont ils disposaient.

« Vous allez devoir vous en charger, quant à moi je me charge du tas de plumes! »

L’Orc ne laissa pas le temps à son camarade d’y réfléchir, il lui tendit sa hache avant de se mettre à courir en faisant de grands signes avec ses bras à l’intention du volatile furieux.

«Hey oh ma poule, viens voir tonton Cran, j’ai une envie soudaine de te faire la bise alors ramène tes sales plumes par ici! Hey oh!»

Ses menaces eurent instantanément l’effet désiré alors que l’aigle géant changeait brutalement de proie. Cran n’avait pas songé qu’une attaque serait si imminente et devait impérativement récupérer sa hache car même s’il l’aurait voulu, ce pauvre Beogus n’aurait jamais été en mesure de la lui lancer ou de la propulser sur l’oiseau étant donné son poids hors norme. Le rapace plongea et chaque seconde comptait. Le mastodonte à la chevelure de rêve courait aussi vite qu’il le pouvait en direction de l’alchimiste qui voulait désespérément remettre l’arme à son propriétaire tandis que l’aigle filait vers lui.

Lorsqu’ils se croisèrent enfin Cran attrapa sa hache, se retourna avec l’agilité d’un Orc bourré et fit tournoyer l’arme de fortune au-dessus de sa grosse tête. L’oiseau fonçait sur lui les serres grandes ouvertes, mais le mercenaire laissa voler son projectile improvisé juste à temps. L’aigle fureur poussa un dernier cri de rage et de douleur tandis que la hache orque se plantait dans son poitrail duveteux et plein de puces des sables. L’énorme oiseau s’affala raide mort sur le guerrier qui avala quelques plumes au passage. Le mage devait s’affoler puisque de là où il était on aurait pu croire que le rapace malmenait l’Orc qui se débattait sous la volaille puante et inerte.

Avec l’aide de son employeur Cran pu finalement se relever en s’ébouriffant bruyamment.

« Merci bien! Il s’en est fallu de peu, pas vrai? Ce spécimen tout frais est à vous monsieur l’alchimiste, si vous voulez récupérer des trucs pour vos potions, on voit pas ces aigles de près tous les jours. Si vous permettez je vais boire un peu et on reprend la route quand vous voulez Mr.Zacanal, quand vous voulez !»

Tandis que le volatile été étendu sur le sable chaud, les deux compagnons reprirent leur périple.
Ils marchèrent plusieurs heures, après quoi, l'obscurité vint peu à peu déloger la lumière du soleil, adoucissant par la même occasion la température ambiante.

Ils décidèrent de s’arrêter pour la nuit, à leurs pieds se trouvait une dune ornée de rochers s'étendant sur quelques mètres. Ils l’escaladèrent et vinrent se loger contre le plus imposant des rochers, celui-ci les protégerait du vent glaciale de la nuit et les rendrait plus ou moins invisible aux yeux des prédateurs et bandits pouvant roder la nuit.

- Et bien, nous avons là parcouru une bonne distance, il était temps de prendre un peu de repos, nous repartirons demain à l'aube toujours en direction de Varak, une fois là-bas, nous nous ravitaillerons puis suite à une bonne nuit, nous nous rendrons à l'est du désert, d'après les grimoires que j'ai étudié avant de partir, il devrait y avoir un cratère appelait "la pulsion des étoiles".

Beogus fouillât dans sa sacoche et en sorti un petit journal.

- Ce passage est intéressant, écoutes. "Tandis qu'à minuit l'ambiance est calme et apaisante à la pulsion des étoiles, lors du zénith, Elles s'ouvrent à nous, une à une, nous laissant découvrir leurs véritables splendeurs avant de s'éteindre pour un infini que l'on ne saurait tolérer".

Il referma le journal puis le rangea aussitôt.

-Selon moi, ils parlent des étoiles d'iscuella, celles-ci ne dévoilant leurs fleurs qu'une fois le soleil haut dans le ciel tel une pulsion et fanant deux jours plus tard si elles sont cueillis. Donc c'est là-bas qu'on aura le plus de chance d'en trouver.

Beogus prépara de quoi manger tout en restant attentif, au cas où Cran vaudrait s'exprimer.

Cran fronçait les sourcils un peu confus, et pour cause, il n’avait pas l’habitude de tant d’érudition. Pourtant il avait saisi l’essentiel ; Manger, dormir, encore manger, marcher, Varak, marchander, marcher et ultimement trouver le cratère aux fleurs qui meurent dès qu’on les cueille. Il détestait le désert mais un boulot était un boulot et il comptait bien mener à bien cette mission quitte à cueillir des fleurs.

« Ça me semble un bon plan patron. Et une fois qu’on a trouvé les fleurs, comment fait-on pour les ramener avant qu’elles ne meurent?»

Effectivement, ce détail le taraudait depuis plusieurs kilomètres déjà et il ne voyait toujours pas comment une telle chose serait possible. Il avait fini par en conclure qu’une sorte de magie pouvait en être capable, sa cervelle n’était peut-être plus si orc que ça, après tout.

Une fois qu’il eut sa réponse, il entama de manger avec Beogus avant de prendre le premier tour de garde. La nuit était fraîche mais rien de bien contraignant. Le vieil Orc se surpris à ressentir une certaine lassitude en regardant la voûte céleste, peut-être que le temps était venu pour lui d’abandonner se dur métier et de s’établir ici même sur les terres des Hommes. L’atmosphère vivante des villes et la plénitude des petits villages plaisaient à Cran l’une comme l’autre puisque dans les deux cas on retrouvait une sensation de sécurité, rien à voir aux terres situées à l’ouest.

Près de quatre heures plus tard il alla réveiller son compagnon afin de se reposer un peu à son tour. Rien n’avait éveillé son attention, les lieux étaient calmes et il ne devrait pas y avoir de problèmes jusqu’à ce que l’aube ne pointe son nez à l’horizon. L’Orc s’installa, bien calé au grand rocher. Aux côtés de Beogus il trouvait un certain réconfort même s’il ne voulait se l’avouer.

Les derniers amis qu’il avait eu étaient décédés il y avait peu lors d’une attaque de Sulis vagabonds. Ils étaient de redoutables ennemis, beaucoup plus forts que les humains et vifs comme l’éclair. Le pauvre Cran s’était débattu comme un forcené mais ses compagnons de toujours avaient déjà rendu l’âme tandis que les meurtriers fuyaient en ricanant avec l’or des mercenaires.

Une dernière pensée à leur égard, un pincement au cœur puis finalement, le sommeil.


Frais et dispos, les deux aventuriers étaient de nouveau en marche et la distance les séparant de Varak était dorénavant négligeable. Le vent était plutôt timide et cela rendait leur déplacement beaucoup plus aisé. Une caravane naine croisa leur route en provenance de la capitale du désert et ses propriétaires les saluèrent chaleureusement avant de leur lancer quelques fruits juteux accompagnant leur geste d’un clin d’œil et de quelques paroles amicales. Leur traversé s’achevait mais leur quête de l’extraordinaire ne faisait que commencer.